Précis historique extrait des manuscrits de Christian Pingeon

CHRISTIAN PINGEON - MAÎTRE ÉBÉNISTE EXPERT - PARIS
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Au moyen âge et jusqu'à la fin du seizième siècle, dans les pièces où les habitants vivent avec leurs animaux familiers, les sols doivent pouvoir être lavés à grande eau. Aussi les grandes salles voûtées des châteaux (salle des gardes, salles des festins ou "grand tinel"), sont-elles généralement dallées de pierre.

Les planchers de bois sont réservés aux estrades ou marchepieds, placés sous les chaises d'honneur, marque de rang social, sous les lits, voire sous les sièges et les tables des festins hivernaux. Ils sont souvent recouverts d'un tapis velu.

Puis, petit à petit, le sol des étages supérieurs des maisons, en carreaux de terre cuite, se transforme en plancher.
Composés de planches juxtaposées à joints vifs ou à feuillures. Refendus à la largeur de 5 ou 7 pouces (1) les planchers sont fixés sur les solives par des clous forgés apparents.

Aux 16/17ème siècles, est arrivé le plancher assemblé par rainure et languette avec des lames de 3 à 4 pouces. Il est posé "à l'anglaise", c'est à dire que les lames sont de toutes longueurs, les clous deviennent invisibles.

A partir du début du dix-septième siècle, on commence à trouver des lames de plancher disposées selon différents motifs:

- Le plancher en plusieurs travées, formées de planchers de 5 à 6 pieds de long au bout desquelles on met une frise en sens contraire (gravure "les vierges folles de le Blond à Paris, 1640, British Museum), - Le plancher à point de Hongrie, fait d'alaises de 3 à 4 pieds de long et de 3 à 7 pouces de large, sa coupe en bout est faite en onglet (45°). La largeur de chaque travée est de 25 à 34 pouces, elle sont d'un nombre impair de façon à ce qu'il se trouve un joint au milieu de la pièce.

Dans les appartements pour des raisons thermiques et acoustiques, on préfère de plus en plus les planchers de bois auxquels on donne le nom de parquets lorsque plusieurs planches sont assemblées entre elles pour former une "feuille". (le mot parquet venant de parc, enclos entourant l'estrade, d'où se rendait la justice).

Les planchers d'assemblage ou parquets sont généralement constitués par des feuilles de parquet composées de lattes de bois de chêne, assemblées, cirées, qui ont depuis deux pieds (2) jusqu'à quatre pieds de côté mais celle de trois pieds à trois pieds un quart sont les plus usitées, et dont les compartiments sont disposés, soit à l'équerre par rapport au bâti (dit aujourd'hui parquet de Chantilly), soit en diagonale (dit aujourd'hui parquet de Versailles).

Leur épaisseur varie de trois quarts de pouce à un pouce et demi et va jusqu'à deux pouces pour les rez-de-chaussée très humides.

Elles sont fixées sur des lambourdes et posées en diagonale. Ces lambourdes sont au nombre de 5 pour les grandes feuilles et de 3 pour les petites. Ces lambourdes supportent toujours les pointes des feuilles. Elles sont elles-mêmes clouées sur les solives, parfois un sous-plancher supplémentaire s'intercale pour plus de résistance.

Chaque feuille peut être séparée de sa voisine par une frise d'encadrement dite "navette" (de 3 à 4 pouces de large) ou simplement juxtaposée.

Quant à la disposition générale du parquet, elle se fait des deux manières suivantes: l'une est de mettre les côtés des feuilles parallèles à ceux de la pièce, l'autre est de mettre la diagonale parallèle à ces derniers.
L'ensemble pouvant comporter, ou non, suivant le cas une frise sur le pourtour de la pièce, tout au long des murs.
Par contre, la "pierre foyère" ou devant de cheminée, est toujours entourée d'une frise. Pour les pièces de parade, ou de grande qualité, les feuilles seront d'une grandeur relative à celle de la pièce, faisant que l'on trouve un nombre complet de feuilles dans chaque pièce, de sorte qu'il n'y ait que des feuilles et des demi-feuilles, "ce qui donne beaucoup de magnificence et de grandeur à l'appartement".

Ces parquets peuvent aussi comporter une marqueterie massive (appelés alors parquet de marqueterie ou parquet en mosaïque) composé de motifs en étoile, par exemple, comme au château de Maisons. Dans ce même château il subsiste un parquet de marqueterie de bois de rapport, dans le cabinet des Miroirs.
Un autre parquet de bois précieux existait encore il y a peu au château de Fléchères (Ain).

Sur une gravure d'Abraham Bosse représentant la chambre du Roi à Fontainebleau en 1645, on voit un parquet à compartiments carrés décorés de l'initiale royale couronnée, alternant avec de grandes fleurs de lys de bois de rapport.

Nicodème Tessin écrit en 1693 : " A Trianon ... les parquets touchent aux lambris. Il n'y a qu'une seule pièce à Versailles dont le parquet soit par carrés... tout le reste est en losange à la nouvelle manière".

Réservés aux petites surfaces des cabinets et des estrades, les parquets en mosaïque sont aussi employés dans les alcôves, nous apprend le Mercure Galant de 1673: " Les gens de qualité ne veulent plus de tapis de pied dans leurs alcôves, à cause de la poudre (poussière) qu'ils conservent, c'est pourquoi, il les font parqueter de bois de diverses couleurs".

Rien ne subsiste de ces somptueuses mosaïques de bois précieux incrustés, oeuvre de Jean Macé (mort en 1672), qui ornèrent les estrades et certains planchers des cabinets du Louvre (cabinet de la reine mère vers 1665), des Tuileries, de Saint-Germain, de Fontainebleau et de Versailles. Le parquet du cabinet des Médailles est fait par Pierre Poitou aux Gobelins en 1685, ceux des cabinets du Dauphin sont l'oeuvre d'André-Charles Boulle en 1683.

Un portrait du Grand Condé (vers 1660) à Chantilly (Collection Jones, Victoria et Albert Museum - Londres) et quelques rares dessins nous en révèlent l'aspect chatoyant, comme celui de la Petite Galerie de Versailles (1686) oeuvre d'Alexandre Jean Oppenhordt (B.N. Estampes).

Cependant un exemple plus simple est encore conservé dans le cabinet doré de l'hôtel de Brancas à Paris. Un fragment d'une estrade royale en marqueterie d'écaille et de cuivre a peut-être été remployé par Etienne Levasseur (1721-1800) dans un secrétaire appartenant à la reine d'Angleterre.

Au dix-huitième siècle, comme au siècle précédent les planchers des appartements sont constitués par des panneaux de parquets d'assemblage carrés de bois de chêne ciré, dont les compartiments sont posés soit à l'équerre, soit en diagonale, avec ou sans frise.

Des dessins géométriques peuvent en varier l'aspect, tel le parquet de l'hémicycle de la Salle du Conseil à Fontainebleau, orné d'une étoile par Gabriel. En général, les parquets cirés et miroitants restent nus, sans tapis. Ils sont entretenus par les indispensables frotteurs.

A l'hôtel Choiseul à Paris, il existait des parquets de mosaïque de bois de rapport, ainsi qu'on peut le voir sur les gouaches d'Henri Van Blarenberghe (1734-1812) ornant la "boîte Choiseul". D'autre part, il semble qu'à l'hôtel de Soubise, les salons ovales aient eu des "parquets de bois variés avec des ornements et des compartiments très ingénieux". On sait que des ateliers dans la mouvance de l'ébéniste Hache fils à Grenoble, produisaient encore des feuilles de parquets composés de différents bois vers la fin du dix-huitième siècle.
Dans les étages réservés au service, le sol des chambres et des couloirs est garni de carreaux de terre cuite (tommettes) à six pans de quatre pouces (10.8 cm) que l'on cire.

(1) 1 pouce français = 27,0696 mm
(2) 1 pied = 12 pouces = 324,835 mm

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